Sweet Soul Music

Sweet Soul Music

La douce musique de l’âme. Tel est le titre de l’imposant livre de Peter Guralnick. Cette musique de l’âme, c’est la Soul, qui vient du blues et du gospel. C’est une musique de l’âme qui s’est émancipée du sacré, des églises et des temples pour entrer dans le profane. Le Blues a chanté la douleur, la peine, la dure vie. Le Gospel a chanté l’amour de dieu. La Soul chante l’amour, la sensualité, les douleurs et les peines, les joies et les révoltes.
Le livre de Guralnick n’est pas une encyclopédie. C’est le travail d’un amoureux de la musique, et de la Soul ! Ce n’est pas non plus le travail d’un historien, qui va vous raconter les tenants et les aboutissants d’un genre musical. Non, Sweet Soul Music est un roman. Un roman d’hommes, de blancs et de noirs qui ont rêvé ensemble une musique, ensemble à une époque ou la ségrégation était la règle.
Derrière l’érudition se cache une vraie histoire humaine.
Galerie de portraits : Sam Cooke, Ray Charles, Solomon Burke, Otis Redding, James Brown, Sam & Dave, Aretha Franklin, Isaac Hayes et d’autres bien moins connus.
Histoires d’aventures musicales : l’ascension et la chute du Label Stax, l’histoire d’Otis Redding, de Booker T. & The Mg’s, des studios d’enregistrements mythiques de Muscle Shoals, Muscle Shoals ou toute une partie de la musique noire des années 60 a été enregistrée.
Bien sur on se perd parfois dans les noms, les fils des histoires qui se croisent. D’autant que chez nous, seul quelques noms font échos, mais en même temps, quels noms quand même !

« C’est une histoire où Noirs et Blancs sont réunis. Une histoire faite de victoires compliquées, partagée entre racines miséreuses et rêves de la classe moyenne, ambitions esthétiques et luttes sociales, impulsion anarchiste et éthique commerciale. Une histoire où l’on compte indiscutablement des héros et des bandits, même si, dans la vie réelle, il est parfois difficile de les distinguer. En un sens, la soul music semble représenter l’avant-garde de la révolution, et si la révolution ne doit jamais arriver, je ne sais pas si ce que fait la soul a encore de l’importance. »  »Peter Guralnick’’.

Une documentation impeccable, de nombreuses interviews, ce livre, c’est aussi la madeleine de Proust de Peter Guralnick… La passion d’un petit blanc au milieu des foules noires, pour cette musique. Il y raconte l’épopée de ces musiciens, les petites histoires, les petites anecdotes, les coups foireux, les rivalités et les amourettes, les luttes sociales aussi, celle des droits civiques… La musique Soul n’a jamais été déconnectée des réalités de l’époque. Elle est à la fois le fruit de cette époque et l’actrice des changements de cette époque. La musique Soul est révolutionnaire, musicalement et socialement. Un mélange entre l’envie de changer le monde, leur monde et l’envie de réussite sociale. Un mélange entre le mercantile et l’artistique (ses rejetons actuels entre rap caricatural et arenbe sirupeux n’ont conservé que le côté mercantile)… Un véritable métissage entre racines noires et blanches. Pour le meilleur.
Bref, un livre à déguster lentement (pour éviter l’indigestion), un livre qui donne envie, envie de découvrir cette musique, ces artistes.
Une discographie très complète donne des pistes en fin de livre. Mais la multiplicité des éditions des rééditions fait qu’il peut être parfois difficile de s’y retrouver.
 »Sweet Soul Music – Peter Guralnick, éditions Allia.’’
La musique Soul semble revivre de nos jours, avec des artistes comme Charles Bradley, Sharon Jones et Lee Fields voire même Alabama Shakes (pour n’en citer que quelques un). Un retour presque vintage, comme si le temps s’était arrêté. Mais en même une volonté de faire revivre un âge d’or tout en redonnant une modernité à la Soul ! Pour en faire une musique vraiment intemporelle. À découvrir aussi.

 

Cet article est une reprise d’un ancien blog…