the perfect stranger
En 1984, Pierre Boulez et son Ensemble Intercontemporain enregistre The Perfect Stranger, une composition de Frank Zappa ! Oui, le Zappa, guitariste iconoclaste et virtuose.
Le problème de Frank Zappa, c’est que les amateurs de rock lui reprochaient de se moquer du rock et que les amateurs de musique « sérieuse » (et sérielle) lui ont fait le même reproche. Bref, Zappa n’est jamais assez sérieux. Le pire, c’est qu’il y a des critiques rock qui trouvent que Zappa est trop sage, pas assez « impliqué » dans sa musique, bref, personne n’est content. Sérieux, pas sérieux, iconoclaste, irrespectueux, trop respectueux. Faudrait savoir… Le Rock de Zappa n’est pas assez rock et la musique contemporaine de Zappa trop classique, pas assez inventive. Bref…
Deux petites choses. J’ai vu Frank Zappa en concert, à Toulouse, dans les années 1980. Et c’était vif, brillant, virtuose, énergique, amusant… Bien sur, on peut lui reprocher de ne pas être assez authentique, trop intellectuel, pas assez tee-shirt poisseux, pas assez vénéneux. Et puis, j’ai le souvenir d’avoir, retransmis à la télévision française un concert de Boulez dirigeant Zappa, à une époque ou la télévision publique française ne manquait pas parfois d’audace.
Et alors, ce disque ?
Dans cet œuvre, on entend bien que Zappa maîtrise parfaitement les codes et les tics de ce genre musical. Ça démarre comme du Stravinsky ou du Varèse, mais très vite, on découvre les bretelles du clown Zappa, et l’humour en petites touches vient la musique. Ça reste bizarre, pas si loin de ce que peut faire Zappa habituellement, mais en même temps, pour quelqu’un qui ne sait pas qui est ce Zappa, difficile de faire le lien avec un rocker chevelu et moustachu. La direction de Boulez est largement à la hauteur de ce chef d’orchestre, précise, analytique. Quand Boulez a travaillé avec Zappa, ce n’était pas un gag, pas un coup publicitaire, ni pour Zappa, ni pour Boulez. Et Zappa avait déjà flirté avec la musique dite « sérieuse ». Mais il y a de toute manière très souvent un mépris des amateurs de musique « classique » pour ce qui vient du rock. Alors, que les amateurs de Varèse ou de Stravinsky soient rassurés. Zappa reste quand même très sage (même si on décèle ici ou la des notes d’humour), très « classique » dans sa composition. C’est assez formel en somme, même conformiste, et ça manque sans doute d’une certaine profondeur. Ce qui est assez savoureux, quand on sait que Zappa est tout sauf conformiste. Pour tout dire, ce disque est plus anecdotique que vraiment révolutionnaire. Pour tout dire, je préfère largement le Zappa des Mothers Of Invention ou de l’album Hot Rats. Mais la curiosité doit l’emporter et je me devais avoir ce disque. Mais il faut aussi que je trouve Hot Rats.
Frank Zappa – The Perfect Stranger – love story
59 secondes de Zappa…
Ah, mais Zappa a toujours été considéré comme un musicien sérieux, au moins dans mon entourage 😉 Il est parfois iconoclaste, à contrer-courant et jamais tout-à-fait là où on l’attend, mais on ne peut pas lui faire un procès en amateurisme.
Après, que le classique ne soit pas du rock et vice-versa, peu importe ! Comme disait Boulez, il n’y a que deux sortes de musique : la bonne et la mauvaise ! Et visiblement, pour lui, Zappa, c’est de la bonne musique -et Schubert de la mauvaise, mais c’est une autre histoire…-.
Je ne savais pas que Boulez n’aimais pas Schubert ! Mais tu as raison, c’est une autre histoire. J’adore Zappa. Mais, même si j’ai vraiment apprécié cet album Boulez Zappa, je préfère nettement ses albums moins classiques. 😉 Cela étant, c’est quand même intéressant, et à ré-écouter de toute manière.
Comme je l’ai dit dans mon article, j’ai vu, j’ai cette chance de le voir en concert ! Et c’était exceptionnel !