2 commentaires sur “[Un jour, une Photo] La Guerre des Boutons”
[…] – Moi, j’ai entendu mon père, un soir de l’hiver passé, qui racontait aux autres comment il s’y prenait quand il allait voir ma mère. Il entrait par l’écurie, croyez-vous, et il attendait que les vieux aillent au lit pour aller coucher avec elle, mais un soir mon grand-père a bien manqué de le pincer en venant clairer les bêtes ; oui, le paternel, il s’était caché sous la crèche devant les naseaux des bœufs qui lui soufflaient au nez, et il n’était pas fier, allez !
Le vieux s’est amené avec sa lanterne tout bonnement et il s’est tourné par hasard de son côté comme s’il le regardait, même que mon père se demandait s’il n’allait pas lui sauter dessus.
Mais pas du tout, le pépé n’y songeait guère : il s’est déboutonné, puis il s’est mis à pisser tranquillement, et mon père disait qu’il en finissait pas de secouer son outil et qu’il trouvait le temps bougrement long parce que ça le piquait à la “gargotte” et qu’il avait peur de tousser ; alors sitôt que le grand-papa a été parti, il a pu se redresser et reprendre son souffle, et un quart d’heure après il était « pieuté” avec ma mère, à la chambre haute.
Voilà ce qu’ils faisaient ! Est-ce qu’on a jamais fait des “trueries” comme ça, nous autres ? Hein, je vous le demande, c’est à peine si on embrasse de temps en temps nos bonn’amies quand on leur donne un pain d’épices ou une orange, et pour un sale traître et voleur qu’on fouaille un tout petit peu, ils font des chichis et des histoires comme si un bœuf était crevé.
– Mais c’est pas ça qui empêchera qu’on fasse son devoir.
– Tout de même, bon Dieu ! qu’il y a pitié aux enfants d’avoir des père et mère !
Un long silence suivit cette réflexion. Lebrac recachait le trésor jusqu’au jour de la nouvelle déclaration de guerre. Chacun songeait à sa fessée, et, comme on redescendait entre les buissons de la Saute, La Crique, très ému, plein de la mélancolie de la neige prochaine et peut-être aussi du pressentiment des illusions perdues, laissa tomber ces mots :
– Dire que, quand nous serons grands, nous serons peut-être aussi bêtes qu’eux !
Extrait de: Louis Pergaud. «La Guerre des boutons.»
Belle histoire et aussi un chouette film, le premier, en noir et blanc bien sur ! Et n’ayant pas vu les autres, je ne ferais pas de comparaisons !
[…] – Moi, j’ai entendu mon père, un soir de l’hiver passé, qui racontait aux autres comment il s’y prenait quand il allait voir ma mère. Il entrait par l’écurie, croyez-vous, et il attendait que les vieux aillent au lit pour aller coucher avec elle, mais un soir mon grand-père a bien manqué de le pincer en venant clairer les bêtes ; oui, le paternel, il s’était caché sous la crèche devant les naseaux des bœufs qui lui soufflaient au nez, et il n’était pas fier, allez !
Le vieux s’est amené avec sa lanterne tout bonnement et il s’est tourné par hasard de son côté comme s’il le regardait, même que mon père se demandait s’il n’allait pas lui sauter dessus.
Mais pas du tout, le pépé n’y songeait guère : il s’est déboutonné, puis il s’est mis à pisser tranquillement, et mon père disait qu’il en finissait pas de secouer son outil et qu’il trouvait le temps bougrement long parce que ça le piquait à la “gargotte” et qu’il avait peur de tousser ; alors sitôt que le grand-papa a été parti, il a pu se redresser et reprendre son souffle, et un quart d’heure après il était « pieuté” avec ma mère, à la chambre haute.
Voilà ce qu’ils faisaient ! Est-ce qu’on a jamais fait des “trueries” comme ça, nous autres ? Hein, je vous le demande, c’est à peine si on embrasse de temps en temps nos bonn’amies quand on leur donne un pain d’épices ou une orange, et pour un sale traître et voleur qu’on fouaille un tout petit peu, ils font des chichis et des histoires comme si un bœuf était crevé.
– Mais c’est pas ça qui empêchera qu’on fasse son devoir.
– Tout de même, bon Dieu ! qu’il y a pitié aux enfants d’avoir des père et mère !
Un long silence suivit cette réflexion. Lebrac recachait le trésor jusqu’au jour de la nouvelle déclaration de guerre. Chacun songeait à sa fessée, et, comme on redescendait entre les buissons de la Saute, La Crique, très ému, plein de la mélancolie de la neige prochaine et peut-être aussi du pressentiment des illusions perdues, laissa tomber ces mots :
– Dire que, quand nous serons grands, nous serons peut-être aussi bêtes qu’eux !
Extrait de: Louis Pergaud. «La Guerre des boutons.»
Belle histoire et aussi un chouette film, le premier, en noir et blanc bien sur ! Et n’ayant pas vu les autres, je ne ferais pas de comparaisons !